L’UE abandonne l’idée d’interdire la reconnaissance faciale dans les lieux publics
Selon le dernier draft de la stratégie de l’UE en matière d’intelligence artificielle vu par Reuters et EURACTIV, l’Union européenne n’est plus intéressée par la possibilité d’une interdiction de la reconnaissance faciale dans les espaces publics ; cependant, il devrait y avoir des « critères clairs » dans le futur déploiement à grande échelle des systèmes d’identification biométriques dans l’UE.
Un précédent projet de la Commission européenne avait évoqué l’idée d’un moratoire pouvant aller jusqu’à cinq ans afin de se donner le temps de réfléchir aux moyens de prévenir les abus.
Selon EURACTIV, le document indique « Cette évaluation dépendra de l’objectif pour lequel la technologie est utilisée et des garanties mises en place pour protéger les personnes. Dans le cas où des données biométriques sont utilisées pour la surveillance de masse, il doit y avoir des critères clairs quant aux personnes qui doivent être identifiées ».
L’utilisation de la reconnaissance faciale dans les investigations policières a suscité des inquiétudes, car les défenseurs des libertés civiles et de la vie privée craignent que cette technologie ne soit utilisée pour une surveillance massive et discriminatoire, violant ainsi les droits des personnes à la confidentialité des données.
Le projet de moratoire faisait partie d’un ensemble de mesures plus larges visant à réglementer l’intelligence artificielle et ses défis, en particulier dans les secteurs à haut risque, tels que les domaines de la santé et des transports. La proposition est actuellement en cours de révision et la Commission a l’intention de la présenter le 19 février.
Au début du mois, le gouvernement américain a dévoilé ses propres lignes directrices en matière de réglementation de l’IA, visant à limiter la portée excessive des autorités et a exhorté l’Europe à éviter les approches agressives.
Le président de Microsoft, Brad Smith, a déclaré qu’une interdiction de l’IA par reconnaissance faciale équivaut à utiliser un hachoir au lieu d’un scalpel pour résoudre des problèmes potentiels, tandis que le PDG d’Alphabet, Sundar Pichai, a exprimé son soutien.
La plupart des dérives rendues possibles par les nouvelles technologies ne découlent pas de leurs défaillances ou aspects intrinsèques mais de la façon dont les humains les paramètrent (biais numérique) ou les utilisent (ultralibéralisme et technotature). Découlant, la réponse à ces dérives est la régulation de leur emploi en fonction de l’intérêt général des citoyens.
Nous voyons ici que les mandataires européens légifèrent sur un sujet d’importance et changent régulièrement de position … sans que le citoyen n’ait rien à dire. Car, comme précisé par l’article, ce sont les entreprises et le Président Trump qui ont été entendu sur ce dossier. On peut même se demander ce qui a poussé la commission et le Parlement à intervenir… Ces institutions avaient-elles le désir de régler un problème ou d’inciter certains lobbyistes leur faire des propositions ?
Les mandataires et fonctionnaires européens reconnaissent volontiers le déficit démocratique des Etats mais n’admettent pas qu’on leur retourne le compliment. Position intenable vu que le cadre institutionnel européen est indéniablement moins démocratique que les autorités nationales : une seule institution élue parmi les institutions dirigeantes, pas de codécision systématique des actes législatifs par le Parlement, pas de droit d’initiative législative pour les députés, une lobbycratie institutionnelle mis en œuvre par le biais de la comitologie. Il n’y pas de vraie possibilité d’alternance vu que le programme du PPE est directement transcrit dans les traités. Mais quelle importance puisqu’il arrive pratiquement toujours en tête lors des élections.
On relèvera le contraste entre les eurocrates et des dirigeants singapouriens. Les fonctionnaires de la « démocratie » européenne rejettent toute critique, assimilée d’office à de l’europhobie quand les fonctionnaires de la dictature singapourienne sont cotés par les administrés et sanctionné en cas de mauvais bilan. La Commission vante volontiers le droit de pétition reconnu par le Traité de Lisbonne tout en s’étant octroyé le droit de censurer les pétitions « inappropriée ». Si les eurocrates n’admettent aucune revendication en matière de démocratie, il n’est pas rare qu’ils critiquent ce régime en des propos d’un autre âge…
C’est donc le moment de rappeler que la critique du déficit démocratique de l’UE, un problème bien réel, s’accroit au fil des ans est n’est aucunement le monopole d’idiots, de populistes ou d’eurosceptiques.
A lire sur le site de la Fondation Res Publica // Peut-il y avoir une démocratie européenne ?
(https://www.fondation-res-publica.org/Peut-il-y-avoir-une-democratie-europeenne%C2%A0_a1247.html)
A lire sur le site de la Revue géopolitique // Dossier géopolitique : La démocratie
(https://www.diploweb.com/Dossier-geopolitique-La-democratie.html)
A lire sur Pour la Solidarité // Déficit démocratique Un défi pour l’Europe !
(http://www.pourlasolidarite.eu/sites/default/files/publications/files/na-2019-deficit-democratique.pdf)
A lire sur L’Echo // Construire l’avenir de l’Europe. Oui ! Mais en partant de la base, pas du sommet…
(https://www.lecho.be/opinions/carte-blanche/construire-l-avenir-de-l-europe-oui-mais-en-partant-de-la-base-pas-du-sommet/10206902.html)
Gageons, pourtant, que certains tiendront l’ensemble des transhumanistes pour responsable de toute forme d’aliénation technologique, notamment celles consécutives à la reconnaissance faciale et l’hypersurveillance. En terme de réputation, il est vrai qu’il est moins périlleux de les critiquer que d’émettre des réserves sur l’action des eurocrates. Si certains transhumanistes sont bien despartisans de régimes autoritaires d’autres n’ont-ils pas plaidé en faveur d’un renforcement de la démocratie avec une extension du champ de la démocratie directe et électorale, d’un développement de la démocratie participative basé sur le modèle de l’économie collaborative? Et, SURTOUT, de la démocratie référendaire telle qu’elle est pratiquée en Suisse et en Californie ?
La démocratie n’est pas juste le régime où les électeurs peuvent élire des députés tous les cinq ans.