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L’IA va-t-elle aussi tuer la démocratie ?

ISBN-10: 2709664046

Deux textes, deux mises en gardes urgents : l’IA va-t-elle dynamiter la politique ?

Pour Laurent Alexandre les effets de l’irrésistible progression de l’intelligence artificielle vont tout bouleverser. À l’origine on pensait qu’Internet deviendrait le principal outil de la promotion de la démocratie, au contraire le web est devenu un outil majeur de désinformation et de contrôle policier, allié des régimes les plus autoritaires. Le pouvoir est désormais tout entier dans une poignée de mains : Washington et ses GAFA, le parti communiste chinois et ses BATX.

Le capitalisme cognitif – c’est-à-dire l’économie de la connaissance, de l’intelligence artificielle et du big data va modifier radicalement la hiérarchie des nations. L’Europe est en péril, la France ne réagit pas, le politique est coupable !

Jean François Copé, dans un second texte, répond aux inquiétudes et anathèmes de Laurent Alexandre. La politique doit devenir plus importante que jamais pour réguler notre pouvoir démiurgique sur la nature et nous-même et donc décider de l’avenir de l’Humanité. Des initiatives précises sont à prendre à tous les niveaux : manipulations génétiques, sélection embryonnaire, intelligence artificielle, la fusion neurone – transistor… Il faut sauver la politique pour sauver l’homme.

3 Comments »

  1. Je commente le livre à l’attention de ceux qui ne l’ont pas encore lu.

    D’abord, clarifions la terminologie des auteurs. « IA » signifie « haute technologie » ou « maîtres de la high tech ». « démocratie » ne désigne pas la vraie démocratie, régime critique par les auteurs dont la démocratie représentative n’est qu’un volet, mais la particratie. Il faut donc comprendre le titre comme « Est-ce que les maîtres de la high tech vont tuer la particratie comme ils ont tué les échecs ? »

    Les auteurs sont inquiets de l’érosion des pouvoirs des patriciens européens sous l’action des grandes puissances, des acteurs du marché, des mouvements contestataires extrémistes et du discrédit croissant auprès de l’électorat. C’est que certains régimes autoritaires fascinent désormais une part croissante des masses populaires en raison de leur bilan (p 114, 125), comme ils fascinent une part croissante de la classe politique en raison de la liberté d’action de leurs dirigeants : tel est pris qui croyait prendre.

    Dans la partie I, le Dr Alexandre expose une théorie de la puissance et du développement qu’on peut résumer comme suit : 1° Tout malheur découle des retards dans le domaine de « l’IA », jamais de l’ultralibéralisme économique. 2° « L’IA » est la source de tout progrès, jamais de l’Etat-providence. 3° « L’IA » ne peut être combattu que par « l’IA », 4° Une démocratie authentique est inutile quand elle n’est pas illusoire, tout pouvoir réel étant l’apanage des maîtres de l’IA. Sur cette base, il dresse un tableau apocalyptique de l’UE. Faute de moyens adéquats, elle est devenue la cible effective ou potentielle de différentes prédations : géants du numériques, Russie, technotatures… Ce discours est enrobé de remarques dispensables, oscillant entre les formules déplacées façon Macron et les idées du NRx mais passons.

    En réponse à la crise, le Dr Alexandre ébauche une stratégie assez confuse. Il reconnaît le prochain déclassement des USA par rapport à la Chine (p 126) mais il souhaite le maintien de la servilité atlantiste (p 132-133) au détriment de la relation avec les BRICS. Il craint les excès des ASI (p 127) mais il prétend que les IA conscientes poseraient moins de problèmes de sécurité que les IA faibles (p 48). Il souhaite que l’Etat français modère l’utilisation des données (p 66) mais critique le règlement RGPD (p 84). Il met en évidence le fait l’automatisation réduira toujours plus l’offre d’emploi (p 141-142) mais rejette tout revenu minimum garanti à vie (p 121) au profit d’un curieux « workfare state » fondé sur la neuropolitique. Par contre, de nombreuses références chronologiques corrobore la prospective effectuée par Jacques Attali dans « Une brève Histoire de l’Avenir » (surtout pour la période 2010-2035).

    Dans la partie II, Monsieur Copé propose de muer la France en « IA Nation » en imitation du modèle estonien : développement de l’IoT, extension de l’hypersurveillance, maximisation de l’automatisation et de la guichèterie électronique. La France pourrait ainsi participer au renforcement de la souveraineté numérique de l’UE : création de « GAFA » européen au sein d’un cloud européen avec cybersécurité renforcée, lancement d’un programme Apollo de l’IA. Devenu inattaquable, l’UE pourrait organiser un « Yalta de la souveraineté » afin de négocier sa coexistence pacifique avec les USA, la Chine et les géants du numériques des trois puissances ; il ne précise pas quelle attitude adopter face à l’OTSC. A la différence de son co-auteur, Monsieur Copé distingue n’intègre aucune stratégie transhumaniste dans sa doctrine (p 155-156).

    L’application des idées des auteurs entraînerait une hausse de la consommation électrique et de la demande en matériaux stratégiques : ils comptent sur le secteur privé pour y pourvoir. Concernant l’impact de l’automatisation sur l’emploi, Monsieur Copé soutient que la hausse de l’automatisation réduirait mécaniquement le taux de chômage. Pour tout argument, il cite une poignée de pays qui présentent les statistiques adéquates. Non seulement on peut citer des contre-exemples (Chine et Thaïlande pour 2018) mais encore faut-il prouver le lien de cause à effet. Dans le cas du Japon, la baisse de natalité et les barèmes salariaux ont entraîné une pénurie de main d’œuvre. Au grand dam des Japonais, elle devra être compensée par des travailleurs immigrés puisque la robotique n’a pas encore tenu ses promesses. Rappelons que le non-respect des impératifs écologiques, économiques et sociaux du développement durable entraîne progressivement l’effondrement d’une civilisation.

    Les deux auteurs sont manifestement des européistes convaincus mais ils restent assez vagues sur les modalités d’application de leurs propositions, plus particulièrement à l’échelon européen. Je recommande donc de compléter sa lecture de la partie II par celle de « Osons l’Europe des nations » de Christian Saint-Etienne (http://www.melchior.fr/lecture/osons-leurope-des-nations). Cet essai présente un projet de noyau dur fédéral pour l’Union européenne, la Fédération Economique Européenne Carolingienne. La « Fée carolingienne » serait structurée pour faciliter la mise en œuvre d’une « économie de l’innovation » ou « iconomie ». On peut s’inspirer de la « Fée » de Saint-Etienne pour concevoir une coopération renforcée groupant les pays de l’IEI, du Groupe de Visengrad et de l’Assemblée balte. Elle aurait pour fonction de mettre en œuvre les acte-cadre de l’UE pour le compte des Etats affiliés et de mettre en œuvre une iconomie inspirée des idées de la Partie II.

    Monsieur Copé appelle à maximiser l’usage des drones militaires sans proposer de stratégie des moyens. Une idée : Concentrons-nous sur développement d’un androïde de téléprésence apte à utiliser l’équipement humain à destination des unités médicales et de génie qui devrait opérer dans une zone contaminée par une attaque NBC. Les retombées civiles sont évidentes et ce type de drone permettrait d’aligner des unités dotées de véhicules habités mal protégés, appliquant selon la Théorie de la Non-Bataille de Brossolet. Le développement des drones ne se ferait pas au détriment du développement des équipements utilisables par les humains. On éviterait aussi de reproduire l’erreur du programme FELIN : Le développement d’une inutile panoplie de crupellaire numérique, abandonnée depuis, a été financé au détriment des armements de base, forçant notre pays à acheter à l’étranger les pistolets et fusils d’assaut qu’il n’est plus capable de produire lui-même.

    A l’évidence, les auteurs sont des « optimares », pas des Gracques. Pour eux, « sauver la démocratie » revient à sanctuariser la position du patriciat européen et, à cette fin, restaurer sa légitimité auprès de l’électorat mais sans concession en matière de démocratie providentielle. Le sort de la plèbe européenne leur importe peu. Eh bien, c’est justement aux plébéiens de prendre leur destin en main. Je constate à ce sujet que ni la démocratie, ni les civic tech n’ont été inclus dans les thèmes étudié par le site (cfr rubrique A propos). Dommage que la cyberdémocratie soit moins documentée que l’hypersurveillance et la reconnaissance faciale.

    Site La démocratie (http://www.la-democratie.fr/index.htm)

    C’est quoi la civic tech? (http://civictechno.fr/2016/01/16/cest-quoi-la-civic-tech/)

    Site Démocratie électronique (https://www.democratie-electronique.fr/definition/)

    Site de l’Association Périferia (https://periferia.be/presentation/)

    PDF «Un budget public réellement participatif, est-ce possible en Belgique ? » (http://www.periferia.be/Bibliomedia/PUB/EP2014/Pub_periferia_2014_manuel_bp.pdf)

    Site du mouvement Démocratie directe & Résilience (http://www.democratie-directe.com/qui-sommes-nous/)

    Projet de Constitution du mouvement Démocratie directe & Résilience (http://www.democratie-directe.com/documents/Constitution_transitoire.pdf)

    Collectif Démocratie ouverte (https://democratieouverte.org/themes/search/Projet)

    Site Le Coup d’Etat citoyen (http://lecoupdetatcitoyen.org)

  2. Ce débat est risible !
    Ceux qui comprennent rien de l’intelligence artificielle ont des opinions désaxés à un tel point! On coupe la parole pour dire des bêtises !
    Bravo à J-F Copé et Laurent Alexandre pour l’initiative, et pour la patience !

    • Emile, n’exagérez pas.

      Les animateurs n’ont pas « coupé la parole pour dire des bêtises », ils ont questionné poliment les invités et ont exprimé calmement des points de vue auquel on est pas obligé d’adhérer. D’autres invités, comme Mélanchon ou Poutou, ne sont pas traités de manière aussi courtoise.

      On va pas faire tout un plat parce que Ruquier a insisté pour que Laurent Alexandre donne son point de vue sur les projets prolongistes de la Silicon Valley: S’il ne voulait pas être interrogé là-dessus, il n’était pas obligé d’y faire référence dans un livre sur l’IA. Charles Consigny me semble excessivement sceptique quant à l’impact futur de l’automatisation mais il n’a coupé la parole à personne.

      Ce que je relèverai, ce sont les approximations du Docteur et de Copé qui ne crédibilisent pas leurs propos sur l’IA mais ont certainement contribué à donner une image négative du transhumanisme.

      D’abord, ils sont d’accord pour définir l’IA comme « l’ensemble des techniques qui permettent de créer des machines qui simulent l’intelligence humaine ».

      Admettons. Mais pourquoi voir de l’IA partout?

      La censure numérique chinoise n’a aucun rapport avec l’IA. Ce sont les humains de Google et d’autres entreprises numériques qui sont responsables.
      Le soulèvement des Gilets jaunes n’a rien à voir avec l’IA. Ce sont les humains à la tête des Etats et du marché qui sont responsables mais si ces derniers sont fort peu critiqués.
      Les bébés transgéniques chinois n’ont rien à voir avec l’IA. Ce sont des généticiens humains qui sont responsables et il n’est nul besoin de système expert comme Watson ou Siri pour exécuter des actes de transgénèse.

      D’une certaine façon, ils emploient tous deux le terme d’IA pour désigner des tas de technologies et d’actes humains sans rapport avec l’IA.

      Mais ce qui me désole le plus, ce sont les références inutiles à certains projets de certains transhumanistes qui ne sont pas plus en rapport avec l’IA qu’ils ne sont représentatifs de l’ensemble de la mouvance transhumaniste.

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