Skip to content

Colloque international : L’humain et ses prothèses : savoirs et pratiques du corps transformé

11 et 12 décembre 2015, Paris

Ce colloque est organisé avec le pôle de recherche « Santé connectée et humain augmenté » du CNRS. Les questions qui seront abordées ont une visée interdisciplinaire et une volonté de confronter différentes approches européennes (France, Royaume-Uni, Belgique, Suisse) sur la question de l’hybridation technique du corps humain.

Dans un monde en pleine mutation, la médecine, outre son rôle traditionnel de soin, multiplie ses offres et ses innovations pour une société avide du meilleur, qui incite l’homme à traiter son corps comme un objet toujours perfectible.

C’est dans cette « disposition prométhéenne de l’homme » que la médecine, alliée à la technique, pose actuellement un autre regard sur le corps malade ou handicapé puisqu’elle permet d’accéder à des dispositifs prothétiques qui s’imposent comme des solutions palliatives idéales. Même s’ils permettent à ces personnes d’avoir accès à des traitements auparavant inimaginables, et de bénéficier d’avancées scientifiques inestimables, ils les engagent dans une dépendance qui va au-delà de l’accoutumance à un objet. Elles participent d’un processus complexe qui amène à la construction paradoxale du corps, affectant le sujet dans un au-delà de la construction de son image.

Par ailleurs, derrière cette proposition de l’homme « réparé » et porteur d’espoir, une autre vision de l’humain se profile en coulisse, celle d’un homme « augmenté » dans ses capacités. Ces connexions hybrides de prothèses directement intégrées au corps s’inscrivent dans le fantasme d’un humain idéal. Elles ne sont pas l’expression d’un désir nouveau, mais peuvent être comprises comme des solutions répondant aux exigences contemporaines du processus civilisateur – ce que Freud a appelé Kulturarbeit.

Être hybride engage le sujet dans un corps à corps avec la technique et provoque des expériences corporelles nouvelles, sans être certain d’en contrôler les effets.

Voilà de quoi alimenter avec vigueur le mouvement transhumaniste, qui trouve son origine aux États-Unis, du moins dans sa forme contemporaine. Si ce mouvement se scinde en de nombreux courants, tous partagent cependant la même ambition, celle de modifier l’humain par des technologies pour lui permettre de dépasser ses limites naturelles, d’avancer vers une « évolution choisie » et, surtout, d’en finir avec la vulnérabilité du corps (vieillesse, maladie, mort, etc.). Dans l’idéologie transhumaniste, l’hybridation corps-technique est non problématique. Le corps est considéré comme plastique et ne serait pas ontologiquement différent d’une machine dont on pourrait, à loisir, remplacer ou modifier des parties, en évacuant ainsi les dimensions subjectives et pulsionnelles. Pour ces militants du progrès illimité, qu’en est-il des questions interrogeant l’éthique et le psychique ?

LIRE AUSSI 🔖  ARTE - Au coeur des robots

Ces expériences nouvelles inscrites dans un nouvel idéal prométhéen, soulèvent des questions inédites : Comment conjuguer la technique dans une interaction qui ne laisserait pas de côté ce que l’on pourrait considérer comme des aspects fondateurs de l’humain ? Dans cette offre actuelle de la médecine, en complaisance avec la technoscience, qu’en est-il des destins pulsionnels du sujet ? Serions-nous en train d’assister à la création de nouvelles formes d’habiter son corps ? Quels sont les configurations et enjeux psychiques du « faire corps » avec la prothèse ?

Ce colloque est l’occasion de créer un dialogue entre historiens, anthropologues, sociologues, médecins et psychanalystes sur le fonctionnement de la logique prothétique.


Playlist 

Intervenants

Pierre Ancet (Philosophe, Centre Georges Chevrier, CNRS-Université de Bourgogne)
Bernard Andrieu (Philosophe, EA Techniques et Enjeux du corps, UFR STAPS, Université Paris Descartes)
Paul-Laurent Assoun (Psychanalyste, Professeur à l’UFR d’Etudes Psychanalytiques, CRPMS, Université Paris 7-Diderot)
Miguel Benasayag (Philosophe et psychanalyste)
Fethi Benslama (Psychanalyste, Directeur de l’UFR d’Etudes psychanalytiques, CRPMS, Université Paris 7-Diderot)
Jean-Michel Besnier (Philosophe, EA Rationalités Contemporaines, Université Paris-Sorbonne)
Anne-Laure Boch (Médecin des Hôpitaux de Paris et docteur en philosophie)
Naïma Brennetot (Psychologue clinicienne, Centre de références des maladies rares, Hôpital Saint-Maurice, Saint-Maurice)
Daniela Cerqui (Anthropologue, Faculté des sciences sociales et politiques, Université de Lausanne)
Hervé Chneiweiss (Neurobiologiste et neurologue, DR CNRS, Neuroscience Paris Seine IBPS, CNRS-Inserm-UPMC, Président du Comité d’éthique de l’Inserm)
Christine Clerici (Professeure à l’UFR de Médecine et présidente de l’Université Paris 7 – Diderot)
Maxime Derian (Anthropologue, post-doctorant à l’ISCC et au CRPMS)
Véronique Donzeau-Gouge (Professeure d’informatique au Cnam et chercheuse associée à l’ISCC-CNRS)
Jean-Yves Goffi (Philosophe, Université Grenoble 2 – Pierre Mendès-France)
Valentine Gourinat (Doctorante en sociologie, Université de Strasbourg)
Pascal Griset (Professeur d’histoire contemporaine, directeur de l’ISCC-CNRS)
Paul-Fabien Groud (Doctorant en anthropologie, Université Lumière Lyon 2)
Nathanaël Jarrassé (Roboticien, Chercheur à l’Institut des Systèmes Intelligents et de Robotique, CNRS-Université Pierre et Marie Curie)
Édouard Kleinpeter (Ingénieur de recherche, ISCC-CNRS)
Simone Korf Sausse (Psychanalyste, MDC à l’UFR d’Etudes Psychanalytiques, CRPMS, Université Paris 7- Diderot)
Xavier Labbée (Avocat au barreau de Lille, Professeur à l’Université de Lille 2)
Laurie Laufer (Psychanalyste, Professeur à l’UFR d’Etudes Psychanalytiques, CRPMS, Université Paris 7-Diderot)
Samuel Lepastier (Psychanalyste et chercheur au CRPMS)
Thomas Lepoutre (Doctorant, CRPMS, Université Paris 7 – Diderot))
Cristina Lindenmeyer (Psychanalyste, MDC-HDR à l’UFR d’Études psychanalytique, CRPMS, Université Paris 7- Diderot et chercheuse associée à l’ISCC-CNRS)
Jean-Noël Missa (Philosophe, Faculté de Philosophie et Lettres, Université Libre de Bruxelles)
Isabelle Queval (Philosophe, Centre de recherche Sens, Ethique, Société, CNRS – Université Paris Descartes)
Rémy Potier (MDC à l’UFR d’Etudes Psychanalytiques, CRPMS, Université Paris 7- Diderot)
Gérard Reynier (Psychologue clinicien, Hôpital Saint-Louis)
Anders Sandberg (James Martin Research Fellow, Future of Humanity Institute, Oxford University)
Véra Savvaki (Doctorante CRPMS, Université Paris 7-Diderot)
Silke Schauder (Professeure en psychologie clinique, UFR sciences humaines, sociales et philosophie, université de Picardie-Jules Verne)
Alain Vanier (Psychanalyste, directeur du CRPMS, Université Paris 7 – Diderot))
François Villa (Psychanalyste, Professeur à l’UFR d’Etudes Psychanalytiques, CRPMS, Vice-Président du Conseil d’administration de l’Université Paris 7-Diderot)

2 Comments »

  1. Morphological freedom: what are the limits to transforming the body? by Anders Sandberg, Oxford Martin School, University of Oxford

    [Draft based on my talk given at the international colloquium “L’humain et ses prothèses: Savoirs et pratiques du corps transformé”, Paris December 11-12 2015, organized by the Institute for Communication Sciences (ISCC, CNRS, Université Paris Sorbonne, Université Pierre et Marie Curie) and the Center of Research in Psychoanalysis, Medicine and Society (CRPMS, Université Paris Diderot).]

  2. CNRS Éditions : L’humain et ses prothèses. Savoirs et pratiques du corps transformé, Cristina Lindenmeyer

    « Réparé, régénéré, augmenté, notre corps intègre chaque jour des prothèses nouvelles, toujours plus performantes. La symbiose humain-technologie s’accélère dans une vie quotidienne où la technique s’immisce partout et à chaque instant. Cette technologisation généralisée s’accompagne d’une volonté affichée de transformer l’homme, une dynamique puissante, surtout connue à travers le mouvement transhumaniste.

    À travers la problématique du corps réparé et/ou augmenté par une prothèse, cet ouvrage interroge ce phénomène contemporain en examinant tant les présupposés idéologiques, les savoirs que les pratiques actuels.

    La psychanalyse, comme clinique et théorie du sujet inconscient ainsi que de ses incidences sur le collectif, sert ici de « boussole » pour appréhender la dialectique concrète entre le corps pulsionnel et ses modes de subjectivation d’une part, le corps organique « réparé/ augmenté » d’autre part. Dans une confrontation active et ouverte, les chercheurs de disciplines diverses prennent en compte chacune des dimensions impliquées dans ce phénomène clé de la condition contemporaine. L’apport des discours et des pratiques permettra au lecteur de former un jugement sur ce phénomène complexe qui noue innovation et aliénation, scientificité et illusion. »

    Cristina Lindenmeyer est psychanalyste, maître de conférences HDR et membre du CRPMS de l’Université Paris 7 Diderot, en délégation au CNRS (2016-2017).