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Congrès futur de l’humain : IA et SF – Où commence la science et où s’arrête la SF ?

Michel Nachez
Docteur en Anthropologie
Chercheur associé au Laboratoire « Cultures et sociétés en Europe »
(UMR 7043 du CNRS)

Strasbourg 2002

Communication au Séminaire spécialisé intitulé Nouvelles technologies : « l’homme terminal ? » ayant eu lieu au Troisième Congrès européen des Sciences de l’Homme et Sociétés qui s’est déroulé à Paris – à la Cité des Sciences – du 19 au 22 juin 2002, ayant pour thème Aux limites de L’humain, séminaire animé par Patrick Schmoll (CNRS, Laboratoire « Cultures et Sociétés en Europe »)

Sommaire :

Les futurs de l’humain selon les «prophètes » de l’Intelligence Artificielle
– Le Transhumanisme est un courant philosophique représenté principalement par une frange de la communauté des chercheurs en IA. Les plus extrêmes de ces transhumanistes sont les extropiens
– Ce qui nous amène à l’Extropianisme
– Pour conclure
– Bibliographie
– Évolution du thème des robots et des machines dans la SF et développement des différents thèmes : les différents futurs de l’humain
– Quelques définitions

Résumé

Sauver ce qui peut l’être et vaut de l’être : la conscience humaine, transférée de la chair périssable à l’impérissabilité des machines. Être, non plus cette créature mortelle tirée du néant par les dieux, mais l’homme immortel et créateur des dieux, dieu lui-même enfin. Et d’ailleurs, la finalité de l’espèce humaine n’aurait-elle pas été, de tous temps, d’en arriver à la création de ces êtres immortels, fusion de l’homme et de l’intelligence artificielle (IA) ?

Cette idéologie transhumaniste a été initiée par la science-fiction et y est déjà en germe depuis les récits datant des années 1950. Analyser cela permet de mieux comprendre la mythologie véhiculée par certains « gourous » de l’IA, eux-mêmes nourris de cette SF.

L’avenir de l’humanité serait-il donc immortalité de la conscience, pérennité de l’être dans son essence ? L’IA sonnerait-elle le glas de l’humanité actuelle : homme terminal ? Et au bénéfice de quoi ? Et quelle serait alors la prochaine espèce intelligente issue de la planète Terre ?

(…)

Ces mondes sont-ils crédibles ?

Qu’en pensent les spécialistes de l’IA et de la robotique?

Les futurs de l’humain selon les « prophètes » de l’IA

Le discours de ces scientifiques plongés dans ces nouvelles avancées de la technologie informatique et de la biotechnologie est généralement enthousiaste et optimiste quant aux futurs développements de leurs disciplines.

Cependant entre le discours et la réalité, il y a un encore gouffre. Si leurs discours ressemblent plus à des récits prospectifs dignes des romans de SF, ce qui se passe dans les laboratoires est certes très prometteur bien qu’encore balbutiant, et est en décalage avec le discours qui annonce l’imminente émergence d’une nouvelle espèce de vie artificielle (pour certains, les machines sont déjà habitées d’une sorte de conscience bien à elles : nous ne le remarquons tout simplement pas).

À l’analyse, tout semble affaire de définitions. Le terme intelligence revêt un sens différent dans le discours des cybernéticiens et des neurobiologistes. Pour les chercheurs en IA, est intelligente une machine qui fait illusion et passe pour intelligente aux yeux des hommes. » (Ganascia, 1993, p.37). On peut donc parler de l’intelligence des machines sans avoir à définir l’intelligence des êtres vivants — ce qui est confortable. C’est la définition qu’en donne Turing en 1950. Et cette vision de l’intelligence des machines reste prépondérante aujourd’hui. Paradoxalement, cette question de l’intelligence des machines a permis de relancer la recherche sur l’intelligence biologique, qui elle-même est loin d’être résolue.

En corollaire à ce concept d’intelligence on trouve celui de conscience. Qu’est-ce que la conscience ? Comment émerge-t-elle d’un système d’organisation complexe tel qu’un cerveau humain?

«Pour Minsky, elle [la conscience] n’est qu’un mécanisme cognitif, devenu pour l’homme une superstition, l’équivalent d’un faux dieu» (Le Breton, 1999, p.l93). Pour pouvoir élaborer un psychisme artificiel fonctionnel, il convient de comprendre ce que sont ces fonctions, comment elles s’élaborent, comment elles se développent. Mais là aussi, chaque hypothèse ne fait que rendre plus manifeste la complexité de la question.

On ne peut comparer un cerveau biologique à un réseau de puces électroniques. Actuellement, les ordinateurs, aussi puissants soient-ils, sont stupides. Ces différences entre le biologique et le cybernétique mettent en lumière l’impasse de la recherche en intelligence artificielle traditionnelle « qui s’efforce de copier les processus mentaux conscients de l’être humain occupé à une tâche particulière. Ses limitations tiennent à ce que les aspects les plus puissants de la pensée sont inconscients, inaccessibles à l’introspection et donc difficiles à transcrire formellement. » (Moravec, 1992, p.28)

De ces constats, la recherche a exploré d’autres voies : l’on ne cherche plus à copier le cerveau humain et ses « logiciels » — tâche trop complexe — mais bien plus à élaborer des algorithmes d’apprentissage évolutionnistes propres aux machines. Agnès Guillot (chercheuse à l’AnimatLab) explique « Notre méthode se situe à l’opposé : partir de systèmes simples qui, intégrés dans un corps physique, se complexifient en fonction des interactions avec l’extérieur. C’est ce qu’on appelle l’intelligence artificielle située » (Agnès Guillot, 2001, p.43) On parle alors de robotique évolutionniste et de vie artificielle. Ces nouveaux robots s’inspirant de la vie animale sont appelés animats.

La spécificité même de ces recherches incluant la possibilité de création d’une machine tellement complexe qu’elle pourrait générer une forme d’intelligence, de décoder le logiciel du vivant permettant ainsi la construction et la reprogrammation du biologique, explique la fascination qu’ont les chercheurs de leurs disciplines. Le sentiment du pouvoir de création absolu, d’être à la source de la compréhension de la vie et de la création d’une vie nouvelle, attise les sentiments d’exaltation. Mais il y a risque celui de menacer l’existence de l’humanité ou tout du moins de la voir perdre sa place de centre de la création. C’est tout une vision du monde qui s’en trouve bouleversée.

En conséquence, l’homme doit changer, doit s’adapter au nouvel ordre de hiérarchie des intelligences et, pour garder sa place, doit se dénaturer pour se surnaturer. C’est la thèse du transhumanisme qui prône le transfert de la conscience humaine dans la machine, en tant qu’égal des supérieures IA.

Le Transhumanisme est un courant philosophique représenté principalement par une frange de la communauté des chercheurs en IA. Les plus extrêmes de ces transhumanistes sont les extropiens. (…)

Lire l’intégralité du séminaire en ligne

 

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