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De l’homme-machine à la machine post-humaine : La vision machinique du monde

cite_055_l204Zarka Yves-Charles, « De l’homme-machine à la machine post-humaine : La vision machinique du monde », Cités, 3/2013 (n° 55), p. 3-8.

URL : http://www.cairn.info/revue-cites-2013-3-page-3.htm
DOI : 10.3917/cite.055.0003

« Le transhumanisme, c’est tout simplement l’idée que la technologie donne à l’homme les moyens de s’affranchir de la plupart des limitations qui lui ont été imposées par l’évolution, la mort étant la première d’entre elles. A terme, on pourrait voir naître, au-delà du post-humain, les premières créatures post-biologiques : soit des intelligences artificielles succèderont à leurs géniteurs humains, soit les hommes eux-mêmes fusionnés avec la machine jusqu’à être méconnaissables » Rémi Sussan, à propos de son livre Les Utopies post-humaines, Paris Omnisciences, 2005.

« Les individus amputés et réparés par prothèse robotique sont en réalité le laboratoire où s’expérimentent les formes de vie de l’avenir : où l’humain sera prolongé, c’est-à-dire à la fois amplifié et potentiellement annihilé par l’avènement d’autre chose qui n’est plus lui » Thierry Hoquet, Cyborg philosophie, Paris, Seuil, 2011

Tout est dit ou presque du post-humanisme dans ces deux passages à la fois du projet et de son actualité. Le post-humanisme est déjà là, aujourd’hui, dans les pratiques technologiques et les représentations du futur : l’homme se croit devenu à ce point maître de lui-même qu’il peut se faire autre que lui-même, se recréer différent, plus puissant, plus performant, plus beau, plus intelligent, enfin plus parfait. Non seulement il n’y a pas de nature humaine, mais il faut abolir tout ce qu’il reste de naturel dans l’homme pour que celui-ci puisse s’accomplir dans un être autre qui ne connaîtrait plus la naissance, la maladie, l’échec, la souffrance et la mort. Un être qui n’aurait plus le caractère erratique que lui confère la liberté. Une société sans conflit où tous les désirs seraient satisfaits parce qu’il n’y aurait plus de désirs, ni rien à désirer, où la soumission à l’autorité ne poserait plus de problème. En somme, il s’agirait de l’avènement d’un être déchargé des limites que lui impose son corps précaire, fragile, insatisfait et mortel. A celui-ci serait substitué un corps artificiel, fait de matière inaltérable ou en tout cas substituable. Rêve ou cauchemar ? Toute la question est de savoir ce qui dans le post-humanisme relève du fantasme et ce qui relève de la réalité….