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Transhumanisme : penser une troisième voie

Notre Club Politique Indépendant des Vendredis de la Colline a officiellement publié, le 15 novembre dernier, son rapport « Transhumanisme : penser une troisième voie ». Dans ce document, nous proposons une réflexion sur l’impact des nouvelles technologies sur ce qui fonde notre humanité, à mi-chemin des positions bio-conservatrice et techno-progressiste. Nous énonçons notamment quelques principes forts pour que jamais l’Homme ne se mutile en espérant « s’augmenter ».

Ci-dessous l’esprit général donné à notre rapport tel que décrit en introduction de celui-ci.

Le décalage est patent. Si, d’un côté, une multitude d’articles catastrophistes annonciateurs de l’avènement d’une intelligence artificielle prédatrice alimente l’effervescence de sentiments contradictoires, de l’autre, pareils questionnements peinent à s’imposer comme enjeux incontournables auprès du grand public. La remise du rapport France IA en mars 2017 au gouvernement participe à la sensibilisation – indispensable – de nos représentants politiques aux thèmes liés à la problématique transhumaniste.

Le docteur Laurent Alexandre, fondateur de Doctissimo, souligne l’incompétence technique de la classe politique sur ces sujets afin d’en expliquer leur délaissement dans nos grands débats de société. Le message qui est le sien, largement repris dans la presse, est alors le suivant : la France – et plus largement l’Europe – accuse un profond retard, certes d’un point de vue technologique, mais essentiellement dans la prise de conscience du tsunami à venir de la part de nos élites. « Dans un siècle, on a Matrix », alerte-t-il le Sénat lors d’une audition publique le 19 janvier 2017.

Déjà déplore-t-il le « bio-conservatisme » de la société française et exhorte-t-il à entrer dans la course au plus vite. Aux Etats-Unis, Elon Musk, fondateur d’OpenAI, tient un raisonnement d’un alarmisme similaire, duquel il tire des conclusions radicales : la puissance cognitive de l’intelligence artificielle va bientôt dépasser celle de l’Homme.

Autant d’appels à un accompagnement d’une hybridation rapide de l’Homme – jusqu’à envisager une greffe cérébrale de composants électroniques – pour lui permettre de développer ses facultés psychiques et motrices.

Le raisonnement, fataliste, prévoit qu’il nous sera impossible d’échapper à cette révolution ; le scénario catastrophe, selon celui-ci, serait pour la France de se retrouver déclassée si elle n’accepte pas de prendre part pleinement à cette escalade technologique, quitte à consentir à des sacrifices éthiques sur l’autel du moindre mal. Pourtant, réduire la problématique à la seule fracture entre le transhumanisme et le bio-conservatisme restreint, considérablement, le champ des possibles dans un esprit d’affrontement dogmatique et a fortiori de défaitisme.

En sus du manque parfois de connaissances scientifiques sur le sujet, une autre raison semble expliquer l’absence du transhumanisme dans l’essentiel des discours politiques : l’indifférence. La montée en puissance d’idéologies technophiles serait un non-évènement. En effet, le développement technique est constitutif de l’hominisation, et son accélération dans le cadre du « progrès » n’est en rien une nouveauté. Plus encore, elle serait même souhaitable selon les chantres des technologies NBIC (nanotechnologies, biotechnologies, informatique et sciences cognitives), dont les prises de position irriguent une logique d’acceptation tacite et, de facto, de participation à la construction du monde post-humain qui se profile à l’horizon.

Toute l’efficacité de l’idéologie transhumaniste repose sur ce double phénomène de résignation et de soumission à la croyance selon laquelle l’humanité n’échappera pas à sa technicisation. Cette domination idéologique s’appuie sur des axiomes culturels et scientifiques très largement acceptés, y compris dans les milieux décisionnels. Or, comme tout système de pensée efficace, le transhumanisme réactualise les présupposés culturels qui permettent son émergence, et par là-même les rend invisibles jusqu’à ce qu’ils soient progressivement acceptés par tous comme des évidences incontestables, selon le mécanisme du biais cognitif – autrement appelé angle mort de polarisation par Emily Pronin et Matthew B. Kugler.

Il ne s’agit pas de refuser le progrès technique dans une ultime convulsion réactionnaire. Il convient, au contraire, d’imaginer une troisième voie qui fasse des technologies NBIC un moyen au service du bien-être humain, et non une fin au service d’une idéologie de dépassement de la nature humaine. Il ne s’agit pas de choisir entre les multiples utopies et dystopies promises par les techno-prophètes en guise d’avenir, mais de prendre suffisamment de recul sur nos conditionnements présents pour éviter de mutiler notre humanité en pensant « l’augmenter ».

1 Comment »

  1. Ce rapport est aux transhumanismes ce que « Superintelligence » de Nick Bostrom est au deep learning: une mise en garde contre certaines dérives. C’est un exercice louable mais il faut bien relever que les auteurs n’ont pas fait de gros efforts de réflexion et donnent une image assez optimiste de la situation du transhumanisme.

    Le transhumanisme est une mouvance aux multiples factions et idéologies. Il n’a ni unité politique, ni unité idéologique. L’idéologie unique du transhumanisme est un mythe inventé par ses contempteurs qui mettent l’accent sur la recherche le singularisme (qui est distinct du transhumanisme, la quête d’immortalité et le minduploading. On peut donc se demander quelle efficacité on peut bien attribué au transhumanisme? A l’évidence, pas celle qui aurait empêché la banalisation de l’opposition au transhumanisme. Pas celle non plus qui permettrait de gagner les coeurs et les âmes en proposant des modèles de société transhumaniste attrayant.

    Pour garantir un usage eudémonique de la technologie, il n’y a nul besoin de penser une « troisième voie » entre les « bioconservateurs » et la nébuleuse des transhumanistes. Il suffit d’admettre que toute personne qui émet des réserves sur le progrès technologique n’est pas un « bioconservateur » et de donner aux masses populaire les moyens de réguler l’usage des nouvelles technologies. Plus de démocratie donc

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